Les apôtres se requinquent dans le Périgord
Cure de jouvence pour des statues miraculées de l’incendie
Enlevées par miracle juste avant l’incendie, les statues de cuivre qui peuplaient la base de la flèche de Viollet-le-Duc effectuent une cure de jouvence dans les ateliers Socra. Elles ont été conçues selon une logique innovante qui leur donne une légèreté aérienne. Après la victoire azérie, des milliers d’Arméniens du Haut-Karabagh ont pris le chemin de l’exil. Ils abandonnent un patrimoine exceptionnel fruit d’une civilisation millénaire. De sombres menaces de vandalisme et de destruction pèsent aujourd’hui sur ces trésors.
Paris, le jeudi 11 avril 2019. Les alentours de la cathédrale sont bloqués. Sur l’île de la Cité, une immense grue manœuvre pour déposer les statues qui s’échelonnent au pied de la flèche de Notre-Dame : douze apôtres et quatre symboles d’évangélistes doivent rejoindre le sol au bout d’une corde, une cinquantaine de mètres plus bas. Cette opération a demandé plus d’un mois de préparation : « Elles menaçaient de tomber », rappelle Richard Boyer, le directeur de la Socra, spécialiste de la restauration des décors monumentaux. Les techniciens ont déjà enlevé les têtes des personnages : « C’est comme une trappe de visite qui permet de voir l’intérieur. Nous avions fait un premier diagnostic. » Reste à déboulonner la base des statues, ligotées au préalable. Elles coulissent à la verticale sur un échafaudage qui sert de rampe de lancement. Sans vent, la météo est favorable. Les silhouettes longilignes s’envolent dans les airs. Après un atterrissage en douceur, elles partent en camion rejoindre les ateliers de Marsac-sur-l’Isle, en Dordogne, à quelques centaines de kilomètres de la capitale. Le lundi suivant, Richard Boyer reçoit un appel de la police. Les flammes de l’incendie ravagent Notre-Dame. L’enquête commence déjà : « J’ai passé la nuit au poste. » Les inspecteurs l’interrogent, comme tous ses collègues du chantier, pour savoir si ses équipes n’auraient pas commis une négligence. Au petit matin, il débarque hébété sur le parvis : « Je vois Philippe Villeneuve blême (lire p. 88), les conservateurs en pleurs… D’ordinaire, nous faisons rarement la bise aux architectes en chef. Là, nous nous sommes pris dans les bras. » […]
Reportage de Priscille de Lassus
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